Douce imposture de Noël, chap. 6

Joyeuse Saint-Nicolas ! Tous les jours du 1er au 25 décembre 2020, je publie ici sur mon blog un nouveau chapitre de ma romance de Noël. Elle est aussi disponible sur plusieurs sites (Amazon, Kobo, Apple Books…) 

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VICTOR

J’ignorais qu’un simple sandwich aurait le pouvoir de me remonter le moral. Je me sens presque humain à nouveau, au point que je parviens à oublier le terrible choc que j’ai eu tout à l’heure au téléphone. Parler à Vanessa m’aide aussi à relativiser l’atmosphère ridiculement concurrentielle qui règne dans ma famille et que j’appréhende toujours un peu à cette période de l’année. 

Puis, alors que je commence à me détendre, je reçois un texto de Ludo.

LUDO : Alors cousin, toujours pas arrivé ? Dis, ça ne t’embête pas si je prends la chambre rouge à ta place cette année ? Le lit dans la tour d’angle n’est pas très vaillant et j’ai peur qu’il s’écroule. 

C’est sa manière pas très finaude de me torturer, je suppose, maintenant qu’il a fait passer le message via Ray — faire allusion à ses prouesses horizontales avec mon ex et essayer de me piquer mon lit par-dessus le marché. Je compose ma réponse en grinçant des dents. 

VICTOR : Hors de question que tu me piques ma chambre, Ludo. J’arrive bientôt, de toute façon. 

LUDO : Là, on est occupés à boire des cocktails, mais si tu n’es pas là à 21 h, je m’installe dans la chambre rouge. 

J’émets un soupir excédé. Vanessa me lance un regard interrogateur et j’explique :

— Mon cousin fait des siennes. 

J’hésite, puis j’ajoute : 

­— Non content de s’être débrouillé pour sortir avec mon ex, il l’a amenée au Bourg pour les fêtes, et maintenant il essaye de me piquer ma chambre. 

Vanessa fait la grimace. 

— Ouille, mais quel conn… oh, pardon, s’interrompt-elle avant de se mordre la lèvre.

— Non, tu peux le dire. Mon cousin Ludovic est un parfait connard.

— Waouh, je compatis. Ton ex ? Sérieusement ? Je suis sûre qu’il a des circonstances atténuantes et je ne connais pas votre histoire, mais ça me paraît gratiné. 

— Ça l’est. 

Je me rends compte qu’en réalité, je peux parler de la « situation » avec cette parfaite inconnue sans en dire trop, sans plonger dans les méandres de ce qui ferait trop mal. Elle m’offre de la solidarité gratuite, et ça ne résout rien, mais ça fait du bien.

La neige se met à tomber peu après notre passage à Troyes. Il ne reste qu’une heure de route, alors, j’espère encore que cela va passer. Vanessa, qui conduit toujours, serre les mains sur le volant et regarde droit devant elle, les yeux vissés sur les feux de brouillard arrière du conducteur qui nous précède. Mais la neige tombe vraiment très dru, et au bout d’un quart d’heure, il devient patent que ce n’est pas une bonne idée de rester sur la route par un temps pareil. 

— Prends la prochaine sortie, dis-je. Ça ne sert à rien d’avoir un accident, il vaut mieux attendre que ça se calme.

Elle fronce les sourcils, l’air contrarié. Mais elle est bien obligée de l’admettre.

— Ouais. J’ai peur que ça ne soit râpé pour ce soir. On tenait une bonne moyenne et j’ai cru que ça passerait, mais là c’est quasiment du blizzard…

Je soupire.

— Désolé, c’est de ma faute. On est partis trop tard. J’avais une ultime course de Noël à faire en ville avant de partir et je l’ai remise au dernier moment. C’était crétin de ma part. 

J’ai voulu trouver un cadeau vraiment spécial pour Raymond, un stylo plume fait main orné de dragons pour ce littéraire fan de fantastique. Mais l’artiste qui me l’a vendu ne pouvait pas me le donner avant ce midi. 

— Pas grave, m’assure Vanessa. Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse ? 

Je la sens un peu tendue. 

— Je propose qu’on se trouve un endroit où dormir. 

Son visage se contracte et je demande : 

— Tu es attendue dès ce soir ? 

Elle secoue la tête. 

— Non. Non, je suis sûre qu’ils comprendront. 

Elle se mordille la lèvre à nouveau, et je ne vois pas tout de suite où est le problème. Quand enfin je percute, je me trouve tout particulièrement idiot. Évidemment que sur un budget d’étudiant, une nuit d’hôtel peut peser lourd. Tout le monde n’a pas le carnet de chèques de la famille Brühler.

— Je t’invite, c’est compris ? C’est à cause de moi que l’on a décollé aussi tard.  

— Pas question, gronde-t-elle aussitôt. 

— Mais si. Accepte. C’est vraiment le minimum. Tu me le revaudras une autre fois, et je me sens vraiment responsable. Je savais qu’il risquait d’y avoir de fortes chutes de neige ce soir, et j’ai quand même attendu le dernier moment pour partir ; c’était de la pure procrastination de ma part. 

C’est peut-être même un peu vrai. Même avec cette histoire de cadeau, j’aurais sans doute pu me dépêcher un minimum, ce qui aurait suffi, mais j’ai attendu le tout dernier moment pour partir. J’ai répondu à la convocation de mon grand-père avec plus ou moins de bonne foi, tout en visant secrètement d’échapper au dîner de ce soir. Peut-être même qu’inconsciemment j’avais envie de rester coincé sur la route, et Vanessa est une victime collatérale de mon manque d’enthousiasme à l’égard de ce Noël. Ce n’est pas juste pour elle. 

Alors, j’insiste. 

— S’il te plaît. Je m’en voudrai si tu refuses. 

Elle considère l’offre un moment, puis pousse un profond soupir. 

— J’accepte mais à une seule condition. Je te dois une faveur. Vraiment. 

Je souris. 

— OK, si tu y tiens vraiment.

Le chapitre suivant est déjà en ligne ici. Toutes les informations sur le livre et les liens vers les différentes plateformes sont ici (il y a aussi une version papier !).

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