Obsession : Chapitre 9

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Et voici le chapitre du jour…

9. JEANNE

Je me laisse tomber dans le canapé. 

Je dois dire que je m’attendais à tout, sauf à ça. 

Si c’est une escroquerie, c’est l’escroquerie la plus naze du monde. Il est le seul à voir des fantômes et il n’essaye même pas de me persuader que je les ai vus aussi ! Il semble très affecté, très inquiet. En fait, il a l’air bouleversé.

Je n’y comprends plus rien. Il n’en veut pas à mon fric. Il en veut très probablement à ma vertu, mais ce n’était pas la peine de se donner tout ce mal si tout ce qu’il voulait était me sauter dessus. Dans n’importe quel bar, ça aurait marché. D’ailleurs, c’est moi qui l’ai pris d’assaut, et lui qui a rompu le contact. 

Hum, ça, mon ego n’avait pas forcément besoin qu’on le lui rappelle.

Concentre-toi, Scarlatti. 

Louis Destel, le voyant-médium, prétend avoir senti la caresse d’un fantôme. Ça ferait de lui une sorte de fou lubrique à fantasme bizarre, sauf qu’il vient de me raconter un rêve. Et ce rêve s’emboîte presque parfaitement avec ceux que je fais, moi, toutes les nuits.

Il pense qu’il rêve de moi. Il veut que je lui dise que je rêve de lui ? 

Je ne sais pas de qui je rêve, je rêve d’un homme invisible, sans visage. Je rêve d’un fantôme en quelque sorte, d’une absence. Jusqu’à présent, j’étais convaincue que mon subconscient se défoulait pour soulager mon esprit surchauffé de toutes ses vexations diurnes : la frustration d’un travail qui me pèse, dont tout le monde me dit qu’il me va comme un gant, mais dans lequel je ne m’épanouis pas. La déception de vivre dans une ville où les hommes ne me trouvent pas assez féminine, pas assez influençable, pas assez obéissante – une conquérante à grosses fesses, une emmerdeuse. Et par-dessus le marché, je suis de plus en plus désespérée de me défaire de ce château. Je veux me débarrasser de ces racines qui m’encombrent et que je n’arrive pas à extirper du sol, même à grand renfort de séances de psy à cent balles de l’heure. 

J’étais persuadée que je crevais de toutes ces frustrations. Tout à coup, une idée s’est immiscée dans mon esprit, c’est Louis Destel qui vient de la planter là. Et soudain, je me demande si je ne serais pas plutôt en train de mourir de nostalgie. 

Moi. Jeanne Scarlatti. Nostalgique.

Je croise les bras, je tente d’invoquer mon alliée familière, la colère. 

Mon rêve, puisqu’en effet je souffre moi aussi d’épisodes oniriques récurrents, le voici. Je parcours les couloirs de Vauvey, à la recherche d’un homme. Pas n’importe lequel, il a beau ne pas avoir de visage ni même de personnalité propre, je sais qu’il est l’amour de ma vie. Pour tout l’or du monde, je serais incapable de me remémorer ce qui nous a séparés. C’est un malentendu, une erreur tragique, je n’ai pas compris : je me suis absentée, j’ai poursuivi un mirage, je me suis laissé éloigner, et à mon retour il n’était plus là. 

Je marche de plus en plus vite, je cours, je me mets à pleurer. Je trébuche, parce que je porte de grandes jupes malcommodes, et que c’est une très mauvaise idée de courir sur un sol inégal quand on ne voit plus rien à travers ses larmes. Je sanglote, je m’étrangle à moitié. 

Autour de moi, le silence est fracassant, mais ça ne m’empêche pas de l’appeler. 

Je me rends compte que je n’ai jamais vu cet absent de mes rêves, mais que je connais son prénom, parce que je le crie à m’en esquinter les cordes vocales.

Louis.

Il s’appelle Louis, lui aussi.

La suite demain ! Ou bien ici.

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